La Bretagne se décline tout l'été à travers les regards des peintres étrangers dans le cadre de deux expositions, "Peintres britanniques en Bretagne (1860-1939)" au musée de Pont-Aven (Finistère), et "Peintres polonais en Bretagne (1890-1939)" au musée départemental de Quimper.

"La Bretagne a toujours attiré les artistes étrangers, dès la seconde moitié du XIXe siècle", souligne Catherine Puget, conservatrice du musée de Pont-Aven (Finistère), déjà à l'origine d'expositions sur les peintres finlandais en Bretagne (1990), les peintres américains (1995) et irlandais (1999).


"Il est intéressant de voir le point de vue des peintres étrangers sur la Bretagne en fonction de leurs caractères nationaux", souligne-t-elle. "Leur oeil différent nous renvoie une autre image de nous-même".

Dès 1860, les peintres britanniques arrivent par bateau ou chemin de fer vers les côtes bretonnes que leur vantent de nombreux récits de voyages de leurs contemporains. De véritables colonies artistiques se développent autour de Pont-Aven, Concarneau, Quimperlé, Douarnenez, Camaret (Finistère), Le Faouët (Côtes-d'Armor) ou Cancale (Ille-et-Vilaine).

"La Bretagne les dépayse et leur paraît exotique. Ils sont attirés d'abord par l'histoire, l'archéologie, les mégalithes, les châteaux, mais aussi les costumes et coutumes paysannes", explique Catherine Puget.

Parmi les 51 oeuvres des 30 peintres britanniques présentées, venant de collectionneurs et de musées britanniques, très peu représentent des paysages purs.

Ils préfèrent les portraits ("Jeune breton" d'Eric Forbes-Robertson, "Paysanne de Bretagne" de Edward Hughes, "Portrait de Bretonne" de Joseph Miler-Kite), et surtout les scènes de la vie quotidienne, où les femmes portent le costume traditionnel, comme "La forge" de Robert Levan, "Scène de marché, Concarneau", de Joseph Bulfield, ou "Chargement du thon sur la digue de Concarneau" de Sydney Lough Thompson.

"Le regard des peintres polonais est très différent", souligne Philippe Le Stum, conservateur du musée départemental de Quimper, qui présente une centaine d'oeuvres, issues du musée national de Varsovie et de grands musées polonais.

"La dimension humaine les intéresse, mais pas le pittoresque breton, ni l'aspect folklorique, qu'ils connaissent déjà dans leur pays", explique-t-il.

Attirés par la nature et la mer, ces Polonais, souvent issus de la communauté polonaise de Paris, peignent de nombreux paysages comme "Paysage maritime en Bretagne", de Stanislaw Ignacy Witkiewicz, "Paysage breton, bord de mer" de Henri Hayden, "Marine au petit bateau" de Wladislaw Slewinski, surnommé le Polonais de Pont-Aven et ami de Gauguin.

D'autres se concentrent sur l'humain, peignant la population locale dans une vision souvent austère, traduisant la misère des paysans de l'époque, comme en témoignent "Le pays triste" ou "Vieille bretonne avec un bébé", de Méla Muter.

Installés eux aussi sur la côte finistérienne (Le Pouldu, Audierne, Concarneau, Quimperlé), ils sont influencés par Gauguin ("Deux bretonnes au panier de pommes", de Slewinski).

Mais ils s'ouvrent aussi au postimpressionnisme, à l'art naïf ("fête nautique au Pouldu" de Hayden) et au cubisme ("Le port de Kérity", de Louis Marcoussis, "Joueurs de biniou" de Thadée Makowski).

mardi 3 aout 2004, AFP.